lundi 25 août 2014

La représentation dans l'espace concret qui a été mise de côté en physique quantique

Un site français traitant de politique et de philosophie des sciences a critiqué la vision de la réalité qui émerge d'un numéro spécial de la revue «La Recherche»: «Eh bien, c’est la très sérieuse revue scientifique "La Recherche" qui relance l’idée que la matière n’existe que par notre pensée, thèse fondamentale de l’idéalisme philosophique pur qu’on pouvait croire disparu avec les progrès des sciences et des technologies, dans son numéro spécial de juillet-août 2014 (...) On y affirme que la seule réalité du monde réside dans les équations mathématiques et aussi que la matière n’existe que si on l’observe».


La critique par le site de cette vision idéaliste (au sens philosophique du terme, c'est-à-dire signifiant que l'esprit humain ne dépend pas de la matière mais est autonome, et que ce qu'on appelle matière dépend de l'esprit humain) est quant à moi fort bienvenue parce qu’elle concerne un débat concret d’une revue actuelle bien connue et de renom. Et aussi parce qu’elle formule une critique méritée de la vision subjectiviste absolue de la réalité. J’abonde dans le même sens mais à partir d’un angle différent. Qu’on en soit rendu là dans une revue de renom est selon moi le reflet d’une crise de la physique quantique actuelle. Cette crise mène à des dérives idéalistes de toutes sortes qui s’appuient de façon légitime ou non sur l’état actuel de cette science.

Le site mentionne donc «On y affirme [dans le numéro spécial de La Recherche] que la seule réalité du monde réside dans les équations mathématiques et aussi que la matière n’existe que si on l’observe», puis fait une critique de ceux qui amènent cette vision.

Quant à moi, je considère que la physique quantique a perdu le contact avec la représentation spatiale concrète des phénomènes de la réalité. Elle manipule beaucoup des concepts et des modèles abstraits dans un monde virtuel hors de l’espace concret. Elle est souvent incapable de donner aux équations qu’elle manipule une représentation sous forme de processus dans cet espace. Comme cela doit se faire quand on travaille par exemple avec des équations différentielles: une même équation mathématique différentielle pouvant référer à différents phénomènes physiques pour lesquels s’appliquent les équations: il faut retrouver les processus physiques où s’applique l’équation et ne pas se contenter des concepts et des espaces abstraits manipulés par les équations. C’est cette transposition spatiale concrète que ne fait pas bien la physique quantique.

On a beau argumenter que le monde à l’échelle quantique est bien différent du monde à l’échelle macroscopique sensible, quand on perd la représentation dans l’espace concret, on perd selon moi un lien beaucoup plus général, le lien avec la vision matérialiste (encore là au sens philosophique, c'est-à-dire signifiant que la réalité existe de façon indépendante de notre esprit). La représentation de la réalité à partir des objets et des phénomènes du monde à notre échelle macroscopique directement accessible par nos sens n’est pas fondamentale, mais la représentation dans l’espace concret l’est. Il est bien difficile d’aboutir ailleurs que dans des concepts abstraits de plus en plus alambiqués et se perdre dans les méandres subjectifs de la pensée lorsqu’on perd cette représentation.

Pour paraphraser l'énoncé du site, je considère que la physique quantique elle-même s’en réfère fondamentalement à la seule réalité des équations mathématiques et des concepts subjectifs découlant de notre expérimentation avec la réalité. Elle ne cherche plus à aller plus loin, du moins c’est ce qu’on voit habituellement au niveau académique et médiatique. Pour certains physiciens, c’est simplement une position pragmatique faute d’une interprétation éprouvée et plus éclairante de la réalité. D’autres en tirent maintenant un crédo subjectiviste absolu. D’autres encore me semblent accorder une réalité concrète à des concepts abstraits issus des équations de la physique quantique.

Ne pouvant plus faire de transposition représentative concrète des équations dans la réalité spatiale, les physiciens quantiques se contentent de concepts abstraits issus directement des formules mathématiques éprouvées par l’expérimentation. Ces concepts abstraits, mais bien liés à l’expérimentation, je le répète et le souligne, remplacent à leurs yeux la représentation par des objets et des phénomènes dans l’espace concret. C’est à cause de cela qu’ils ne cessent pas de nous répéter qu’il faut une expertise mathématique poussée pour réellement comprendre la physique quantique et la réalité. Ils s’en vantent même alors que c’est un symptôme de faiblesse d’interprétation.

De là viennent aussi les dérives idéalistes même si les physiciens sont des scientifiques déterminés à comprendre comment fonctionne la réalité matérielle, qu’ils sont des adeptes convaincus de la vérification expérimentale rigoureuse des équations et des chercheurs continuels de l’amélioration de la précision des résultats.

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